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C'est toujours plus vert ailleurs.
4 novembre 2010

L'art de faire chier.

Voilà. J'ai l'approbation des proches pour ce qui est de rester sur W. J'ai déjà trouvé un stage, peut-être même un logement, j'ai des "amis", j'ai la possibilité de travailler le week end dans ce bar qui me rappelle un peu Rennes. J'ai à peu près tout ce que je cherche, et je fais un blocage sur "et si je passais à côté de quelque chose de bien en France, hein ?". Et si j'étais en train de foirer quelque chose d'encore mieux ?

Le problème de parler une langue qui n'est pas la vôtre dans un pays qui n'est pas le vôtre non plus, c'est que les discussions s'attardent sur le futile. Ou du moins c'est l'impression que ça donne. Les gens s'intéressent à ce que je fous ici, si j'apprécie l'endroit, si j'aime mon boulot, on parle français autour de pintes, on parle allemand, parfois même un peu chinois, et quelque part, c'est assez plaisant de vivre dans une sorte de monde à la Erasmus. Sauf que parfois, la saleté de Hell Air me manque. La saleté de Hell Air et de toutes ces villes par lesquelles je suis passée avant d'atterrir ici. Je suis toujours dans cette phase du travestissement, afin de coller aux critères qui font de moi un professeur présentable, le genre de professeur que les gamins et leurs parents apprécient. J'ai parfois l'impression d'être un pingouin en tailleur qui tente de s'incruster parmi les autres empereurs. "Le tabac c'est mal, l'alcool aussi", c'est pour ça que je joue la demoiselle modèle entre neuf heures du matin et quinze heures de l'après midi. Le soir, je vais dans ces clubs de sport afin de suer comme un boeuf en compagnie d'une centaine d'autres personnes jouant le même petit jeu, et le week end, c'est à peu près le même scénario, sauf que j'ai l'air d'une pute des années 80. "Vomit-free since 2008". On grandit tous, c'est un fait, mais je crois que je me referais bien une tranche de crise d'adolescence. C'est frustrant d'avoir vingt deux ans et d'être à peu près heureuse (même si je crois que je n'ai jamais vraiment su en quoi ça consistait), sur le point d'entamer sa vie professionnelle, et de piler net lorsqu'il s'agit de franchir le pas.
Je n'arrive pas à me contenter d'un joli petit travail, d'une routine bien installée, d'un quotidien terne et chiant, même si j'adore enseigner. J'ai juste peur d'être déçue, et de m'en lasser très rapidement et de vouloir partir aussitôt. C'était plus simple lorsque j'avais seize ou dix-sept ans. Je passais mes journées avec Marie, à écouter NIN dans son mp3, en étant allongée dans l'herbe des parcs entre deux cours, près du Rio Merda, parlant de diverses choses, sans trop vraiment se soucier du reste. Et le soir, on se détruisait le foie en chanson avec Bonnie, à l'aide de vodka frelatée et de bière tiède en attendant l'aube, puis le moment de rentrer chez soi, empestant le tabac froid, en repensant à tous ces foutus actes manqués, ou parfois même, tout simplement ratés.

C'est moche d'être grand.

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